Le bus se fait attendre ... [PV]

Une demi heure. Une demi heure d’attente, une demi heure d’ennui, une demi de froid, une demi heure de perdue. Une demi heure deja que Saya poireautait dans l’arrêt de bus a guetter les deux sphères de lumière qui annoncerait son arrivée. Le pire, c’est que s’il pouvait arriver dans quelques secondes, il pouvait tout aussi bien arriver dans une heure; la jeune fille n’avait aucune idée de son horaire…Peut-être une heure de plus… ça craint.. Deja, elle ressentait le souffle impitoyable du vent s’infiltrer a travers chaque petit trou de ses habits, enveloppant traîtrement son corps telle une chape glacée, et imprégnant ses jeans noirs d’un froid qu’ils n’hésiteraient pas a transmettre a sa peau au moindre contact… Pourtant, elle n’en laissait paraître aucun signe… peut-être y était-elle habituée, empreinte de sa ville d’origine, ou peut-être était-ce par orgueil…

Saya sortit un peu la tête de l’arrêt de bus ou elle s’abritait et jeta un coup d’œil dans la rue… Aucun signe de l’autobus.. aucun signe d’une quelconque voiture…en fait, il n’y avait pas un chat. Pas rassurant…peut-être pas le meilleur endroit pour se chercher un appart’ après tout…pourtant, le jour, le quartier paraissait assez accueillant… Maintenant, seule l’obscurité angoissante environnante de la nuit lui tenait compagnie… Ces reflexions assez défaitistes tirèrent un sourire amusé a la jeune fille. Elle leva un peu la tête et une douce lueur nimba son visage, chassant la plupart des ombres qui s’y étaient tapies. Dans son regard azuré, se reflétait un globe de lumière est d’espoir…la lune, étrangement scintillante. A ses cotés, clignotaient quelques étoiles éparses, leur nombre diminué par les puissantes lumières de la ville, mais la lune elle, y semblait immunisé. Voila, pas que l’obscurité qui lui tenait compagnie finalement… D’ailleurs il lui sembla distinguer une ombre au loin, qui s’approchait…

Quelques mois étaient passés depuis le retour de Mayuko au Japon. Étrangement, le pays du soccer et du bon vin ne lui manquait pas du tout. Seul son frère et sa copine lui laissaient un coté de nostalgie vis-à-vis son départ. Toutefois, ce petit coup de déprime était vite passé alors qu’elle rejoignait la résidence familiale. Là, tout le monde l’attendait depuis longtemps. Sa mère gâteau et si protectrice, son père et ses farces bidon et son grand-père si pervers qui lui avait demandé de prendre des photos des Françaises…Idée de savoir à quoi elle ressemblait. Le pire dans tout cela c’est qu’elle en avait prit! Bref, maintenant qu’elle était revenue chez elle, son plan pourrait être exécuté! Le projet de Mayuko était d’ouvrir sa propre boulangerie Française et d’y vendre les meilleurs pains et brioches du Japon! Original, elle espérait que cela marcherait.

Aujourd’hui, quelques semaines après son arrivée, ce fut le grand jour de l’ouverture de la boulangerie Sayanako. Très heureuse de son succès, elle avait fermée boutique très tard. C’est fou comme la mélancolie lui prenait le cœur par moment…Ken…Même après deux ans, elle repensait très souvent à lui…Deux ans déjà, ça avait passé si vite…Elle soupira…Puis regarda sa montre…

"OUARG!!! NON!!! JE VAIS MANQUER LE DERNIER BUS!!!"

Sur ce, elle se mit à courir comme une folle…Heureusement qu’elle était douée en sport! Tenant d’une main son petit béret, une feuille de l’autre ainsi que son sac, elle n’entendait que sa respiration saccadée et le bruit de ses baskets frapper le sol. Eh non, Mako-chan n’était pas le genre de filles à talon haut. Elle détestait cela. Décidément cette jeune fille n’avait aucune chance…Quoique…C’était de sa faute, étourdie comme elle était…Enfin passons! Voyant l’arrêt de bus, elle augmenta sa vitesse et fit un magnifique sprint. Soulagée de voir que l’autobus n’était pas encore arrivé, elle s’abrita du froid dans le petit compartiment réservé aux personnes qui attendent justement l’autobus. Essoufflée, elle se laissa glisser sur un banc. C’est là qu’elle remarqua une jeune femme près d’elle…C’est fou comme elle était jolie! Quelle classe! Elle devait avoir froid avec ses vêtements troués…Elle se leva discrètement et déposa une veste rayée noir et blanc sur ses épaules.

"Vous devez avoir froid! Prenez ma veste! Comme j’ai couru pour me rendre jusqu'ici, je meurs de chaud! ^-^ "

Souriant d’une petite frimousse de gamine, Mayuko s’adossant sur un pan de la petite cabine et regarda l’heure…O_O…Lâchant un cri strident, elle pleura de façon plutôt exagéré.

"…Non!!!Bouhouhou!! Ma montre ne marche plus!!!...Quelle idiote…J’ai couru tout ça pour rien…+_+…"

Désespérée par elle-même, elle laissa tomber lourdement sa tête sur la vitrine de la cabine et soupira…C’était bien son genre…Elle ne semblait pas gênée d’être si bavarde et extravertie devant la jeune inconnue. Elle tourna la tête et fixa la jeune femme à qui elle avait prêtée la veste. Son sourire revenu automatiquement…Décidément, elle était bien étrange Mayuko!

Le vent ébouriffa ses cheveux roses et noirs alors qu’elle sorti un peu plus la tête de l’abri, quelque peu intriguée par l’identité de la personne qui était tout aussi prise qu’elle, dans ce quartier, a cette heure assez avancée. Saya distingua par intermittence, au grès des halos des lampadaires, les traits fins d’une jeune fille qui courait béret dans une main, et ce qui semblait être une feuille dans l’autre. L’inconnue s’approcha de plus en plus, et finit par s’engouffrer dans l’arrêt de bus avant de se laisser glisser sur le petit banc derrière Saya. Après s’être vaguement demandée qu’est-ce qu’elle faisait aussi ici, la jeune fille détourna la tête, et s’appuya nonchalamment dans l’encadrement de l’abri, ses pensées, momentanément distraites par l’arrivée de l’inconnue, s’étant déjà remises a leur habituelles errances.

Cet instant de calme ne fut cependant pas de longue durée : a peine avait-elle détourner la tête, qu’elle sentit un poids se déposer sur ses épaules. Un coup d’œil confirma son impression, l’inconnue y avait déposée une veste rayée, et lui souriait d’un sourire enfantin.

Girl - Vous devez avoir froid! Prenez ma veste! Comme j’ai couru pour me rendre jusqu'ici, je meurs de chaud! ^-^

Saya la regarda quelque peu étonnée…Comment réagir ? Ça lui semblait étrange qu’une fille qu’elle n’avait jamais vue se permette une telle familiarité, mais elle avait l’air si…innocente… et son geste n’avait rien de malveillant. Aussi la jeune fille se contint en retenant la réaction brusque qui lui avait effleuré l'esprit en premier lieu, et lui répondit d’une voix neutre, en lui remettant sa veste.

Saya - Merci bien, mais je n’en ais pas besoin.

Une fois encore, elle se détourna. Vivement que le bus arrive, elle détestait glander ainsi…Et puis demain ...Un cri strident la tira de ses pensées. Se retournant brusquement, Saya vit cette fois la jeune fille pleurer adossée a un des murs de vitre de l’abri.

Girl - …Non!!!Bouhouhou!! Ma montre ne marche plus!!!...Quelle idiote…J’ai couru tout ça pour rien…+_+…

Saya resta figée un instant… d’accord sa montre s’était bloquée, et elle a peut-être courut pour rien… mais sa réaction était assez excessive... cette fille était vraiment étrange. Elle se remit a fixer la rue, puis, après un moment, lâcha, question de ne pas la vexer par son indifférence et par sa première réaction qui aurait pu passer pour froide :

Saya - Au moins, t’es sûre de pas le manquer…

Non, le vouvoiement n’était pas une habitude de Saya, elle le jugeait inutile… Ce n’était qu’un automatisme qui entravait la sincérité dans une conversation, édifiant dès le depart un mur entre les deux interlocuteurs. Un long silence s’installa, un peu encouragé par l’attitude et la nature parfois asociale de Saya. Quelques minutes s’étaient écoulées alors que la jeune fille esquissa un mouvement vers sa poche arrière. Elle y plongea deux de ses doigts fins, qui ressortirent tenant delicatement une cigarette; puis elle y glissa ses deux autres doigts, mais les ressortis rapidement …

Think - Eh merde …

Elle se retourna vers l’inconnue, faisant desormais dos a la calme lueur de la lune qui enveloppa sa silhouette. La jeune fille lui demanda tout aussi naturellement que négligemment :

Saya - T’as du feu ?

La main fermement agrippée sur son béret, Mayuko avait couru de sa boulangerie à l’arrêt d’autobus sans arrêter une seule fois. Le vent glacial de la nuit lui arrivait de plein fouet au visage et lorsqu’elle s’arrêta, une légère teinte rosée lui saupoudra les joues. Décidément, plus l’hiver approchait et plus les nuits devenaient froides. Bien qu’elle ait songée à apporter une veste en laine avec elle, la jeune femme avait maintenant trop chaud pour la garder sur ses épaules. Ce n’était pas le marathon qu’elle venait de courir mais tout de même, cela restait une bonne longueur! Alors que le ciel bleuté assombrissait les rues, n’importe quelle jeune fille se serait senti un peu insécurisée de marcher seule. Toutefois, Mayuko n’était pas de celles-ci. Étant ceinture noire de karaté et championne de boxe, si jamais un malfrat venait à lui tenir tête, elle l’éclaterait en moins de deux. Petite, mais courageuse. Arrivant enfin à destination, elle remarqua avec joie qu’elle n’était pas seule. Une jeune femme attendait également le bus. C’est fou comme elle avait de la classe! Mayuko était drôlement impressionnée par son charisme. Celle-ci n’avait pas grand-chose sur le dos et, en bonne samaritaine quelle était, la jeune boulangère ne pouvait la laisser comme ça. Donc, elle lui posa subtilement sa veste sur les épaules.

À ce geste, l’autre femme se retourna vers elle l’air étonnée. Il est vrai que même si au Japon, les gens sont très respectueux, il est très rare qu’un inconnu vous offre si gentiment sa veste pour vous couvrir du froid. Sans pour autant être méchante, mais, n’étant pas très amicale non plus, elle lui rendit sa veste.

-Merci bien, mais je n’en ai pas besoin.

Loin d’être offusquée, Mayuko reprit alors son bout de tissu laineux. Le regardant quelques instants, elle finit par le déposer sur le banc près d’elles. Le laissant un peu plus proche de la jeune femme que d’elle-même.

"Comme vous voulez ^-^. Mais je la laisse tout de même là, au cas où vous changeriez d’avis!"

Sur ses quelques mots très gentils, Mayuko lui offrit un sourire chaleureux et empli de douceur. Alors que le calme était revenu, la jeune femme qui paraissait plus jeune que son âge s’exclama dans un grand cri. Apparemment sa montre était brisée et du coup…Elle avait couru tout ce chemin pour rien. Pleurant de façon exagérée, telle une mauvaise caricature de manga, elle laissa tomber sa tête sur la vitrine en plastique du compartiment. Quelle idiote…Ça lui arrivait tout le temps ce genre de choses…

-Au moins, t’es sûre de pas le manquer…

Les yeux globuleux de Mayuko se tournèrent vers la jeune et belle inconnue. Son petit air triste se changea subitement en un beau sourire réconforté. Elle hocha affirmativement la tête. Pas de quoi faire un fromage pour si peu! Le bus n’était pas encore passé non? Cette rockeuse avec parfaitement raison! De nouveau pleine d’énergie, Mayuko décida de s’asseoir un peu, idée de reposer ses jambes de sa course. Le tutoiement que l’inconnue avait optée ne sembla pas choquée la boulangère. Au contraire! Elle qui était déjà de nature très familière, nous pouvons remercier Momo (son père) pour cela, Mayuko fut très contente que quelqu’un ose enfin oublier le vouvoiement conventionnel! Balançant légèrement ses pieds, les mains agrippées sur la banquette, Mayuko réfléchissait.

*On dirait vraiment une rockeuse! C’est peut-être une célébrité! En tout cas, elle a vraiment beaucoup de classe! *o*! Trop jolie en plus! C’est la première fois que je me sens si retournée! J’ai l’impression d’être devant une star! C’est fou -^0^-! *

Faisant des mimiques dans son coin, elle était complètement entrain de craquée, toute seule…De plus en plus bizarre…Mais, elle était comme ça. Toujours dans son petit monde délicat et rayonnant. Ce fut les paroles de la jeune inconnue qui la réveilla de sa torpeur enfantine. Sur le coup, son cerveau sembla déconnecté, comme si elle pensait fermement à la question.

"Non…Je suis désolée je ne fume pas… "

Un sourire désolée, elle repartie dans ses pensées et là, elle sursauta, se levant d’un bond l’air soudainement heureuse.

"Non attendez! J’avais oubliée mais, je viens tout juste d’acheter un briquet! En faite, Pépé, Pépé c’est mon grand-père, il m’avait demandé de lui acheter une revue porno où un briquet selon le prix! ^-^! Finalement j’ai optée pour le briquet parce que le magazine sortait de mon budget! Mais, pour lui faire plaisir je lui aie prit un briquet spécial! Enfin, c’est une drôle d’histoire tout ça!...Tenez."

Sur cette anecdote plus que bizarre…Non mais quel genre de famille elle avait sérieusement…Mayuko lui tendit le drôle de briquet où une photo de femme assez peu habillée y était imprimée. Gentiment, elle attendit que l’inconnue allume sa cigarette et par la suite, elle attendit qu’elle lui redonne le briquet. Une fois fait, la boulangère lui tendit sympathiquement la main. Qui ce serait douté que cette jeune fille avait toute une poignée de main! L’inconnu ne tarderait pas à s’apercevoir que son allure de jeune fille frêle n’était justement qu’une allure.

"Si on se présentait? Je m’appelle Mayuko Sayanako ^-^! Mais vous pouvez m’appeler Mayuko ou Mako-chan! Va votre préférence! À qui aie-je l’honneur?"